C.− LE PROBLÈME POSÉ PAR LES RAVE PARTIES
UNE DOCTRINE À REVOIR CONCERNANT LES RAVE PARTIES
L'attitude des pouvoirs publics, et singulièrement des forces de sécurité, à l'égard des rave parties ou rassemblements de musique « techno » a fait l'objet d'une évolution profonde ces dernières années, qui n'est pas passée inaperçue dans les zones rurales où ces manifestations très traumatisantes ont lieu. D'une réaction ponctuelle, dans l'urgence, face à des rassemblements illégaux, on est passé à une forme de co-organisation par les forces de l'ordre !
On aurait pu y voir une attitude de sagesse, la théorie du moindre mal : préférer à un dangereux chaos et à un véritable risque de débordements, un meilleur encadrement de rassemblements de taille plus modeste. Mais les événements de cet été incitent à reconsidérer cette attitude conciliante et par ailleurs coûteuse en hommes et en matériels, pour la gendarmerie en particulier.
En effet, les deux dernières rave parties organisées dans l'ouest de la France ont réuni respectivement 30.000 personnes à Carnoët dans les Côtes-d'Armor, le rassemblement étant endeuillé par le meurtre tragique de l'une d'entre elles, et 40.000 personnes à Crucey dans l'Eure (sur un terrain militaire). Le nombre de participants ne baisse donc pas. Pis : à Carnoët ont été saisis plus de 12.000 cachets d'ecstasy, 1 kilogramme de cocaïne et d'héroïne et cinq fois plus de marijuana, soit l'équivalent de 70.000 euros au total. Il a été procédé à 40 interpellations qui ont débouché sur une vingtaine de condamnations à des peines de prison ferme. À Crucey, on a compté près de 80 procédures pour détention et usage de stupéfiants. 5.000 personnes ont été contrôlées sur réquisition judiciaire, et les services des douanes ont eu fort à faire également.
Dans ce contexte, il n'est guère surprenant que les élus et la population d'un village de Haute-Vienne se soient mobilisés en août dernier pour exiger la délocalisation de la rave party initialement prévue sur des terres agricoles réquisitionnées. On comprend tout aussi aisément la très vive réaction des élus face à la perspective de l'organisation d'une nouvelle manifestation analogue en Bretagne.
Le sentiment d'insécurité et l'impression d'une impunité tolérée par les forces de l'ordre sont bien réels et sapent l'État de droit. Il faut en être conscient dans ces zones rurales qui par ailleurs s'estiment malmenées en termes de présence des services publics sur leur territoire. Comment tolérer ce qui s'apparente à des passe-droits coûteux pour la collectivité, quand la moindre course cycliste doit satisfaire à un exigeant cahier des charges et prévoir le remboursement des prestations effectuées par les forces de l'ordre pour l'occasion ?
Votre Rapporteur spécial demande instamment :
− que soit réexaminée la doctrine conduisant à une forme de « co-organisation » des rave parties par les pouvoirs publics ;
− qu'il soit fait preuve de la plus grande fermeté à l'égard des trafics de stupéfiants que favorisent ces rassemblements ;
− que soit connu avec précision le coût complet en moyens humains et matériels ainsi qu'en indemnisations ultérieures de telles manifestations.
http://www.assemblee-nationale.fr/12/budget/plf2006/b2568-30-01.asp